La si difficile, mais cruciale, mobilisation des familles vulnérables

France Stratégie vient de publier un rapport intitulé « Scolarité, le poids des héritages », qui confirme un constat déjà bien connu : en France la destinée scolaire des enfants est fortement corrélée à leur origine sociale. Nous sommes même l’un des pays de l’OCDE où cette corrélation se révèle la plus forte. Certains constats de cette note entrent en résonnance avec un autre rapport publié en mai dernier par le CREDOC sur le non recours des familles pauvres en matière de modes d’accueil et de dispositifs de soutien à la parentalité. Nous vous proposons ici un résumé et une analyse de ces deux documents, en lien avec nos missions et nos actions.

Deux passages du  rapport de France Stratégie nous ont particulièrement intéressés, eu égard à nos objectifs de prévention précoce :

« Dès l’âge de 2 ans, les enfants issus d’un milieu socialement ou culturellement favorisé maîtrisent davantage de compétences utiles pour l’acquisition ultérieure des savoirs scolaires que les enfants de milieu défavorisé : compétences langagières (vocabulaire plus riche) et pré-mathématiques, mais aussi socio-comportementales (persévérance, motivation, auto- régulation, etc.) »

« Les enfants qui vivent dans des foyers à faibles revenus, ceux dont la mère a un faible niveau d’éducation ou ceux issus de l’immigration ont le plus à gagner des modes d’accueil formels, notamment collectifs comme la crèche. Les bénéfices concernent le langage, les capacités pré-mathématiques comme les capacités socio-comportementales ».

Il s’agit également d’une donnée désormais bien documentée : bien que les effets positifs d’un accueil en crèche sur le développement des enfants les plus pauvres soient avérés, on trouve beaucoup moins d’enfants de milieu défavorisé que d’enfants des classes moyennes et aisées dans les principaux modes d’accueil formels (crèche et assistantes maternelles). « Seuls 5 % des enfants de moins de 3 ans appartenant aux 20 % des ménages les plus pauvres sont accueillis en crèche, contre 22 % des enfants des 20 % des parents les plus aisés », précise le rapport de France Stratégie.

Il y a 10 ans, en janvier 2013, le Premier Ministre de l’époque, Jean- Marc Ayrault, avait donc réclamé un minimum de 10% d’enfants pauvres par structure. En 2016 est lancé le label AVIP pour les crèches « à vocation d’insertion professionnelle » et en 2018 est mis en place le bonus « mixité sociale »  pour les EAJE (établissements d’accueil du jeune enfant) accueillant un nombre significatif d’enfants en situation de pauvreté.

Le rapport de France Stratégie laisse entendre que l’accueil limité de ces enfants dans les EAJE relèverait d’un déficit de volonté ou de moyens des pouvoirs publics ou des structures elles-mêmes. Pour expliquer cette faible fréquentation des EAJE par les familles défavorisées, la littérature sur le sujet a souvent pointé des freins tels que le coût, l’accessibilité géographique, des créneaux d’accueil inadaptés pour des parents ayant des horaires de travail atypiques, le manque d’information des familles, une auto-censure des parents pauvres qui estimeraient ne pas pouvoir prétendre à un système de garde puisque n’étant pas eux-mêmes en emploi.

Dans notre domaine, le soutien à la parentalité, les facteurs censés expliquer la moindre fréquentation des dispositifs de soutien par les parents en situation de précarité sont l’accessibilité géographique, le manque d’information, leur moindre disponibilité psychique en raison du stress, la garde des enfants, les craintes des parents d’être jugés. On pourrait donc en conclure qu’il suffirait de lever ces freins, de garantir l’accessibilité des informations et du lieu, de proposer un accueil des enfants, de rassurer les parents, pour qu’ils viennent en nombre aux actions proposées. Nous sommes bien placés chez PAPOTO pour savoir que cela ne suffit absolument pas.

Le rapport publié par le CREDOC en mai dernier, intitulé « Quels sont les besoins des familles en situation de pauvreté en matière d’accueil du jeune enfant et d’aide à la parentalité ? », en collaboration avec le sociologue Pierre Moisset, est venu apporter une autre piste d’explication. L’analyse proposée est passionnante et la lecture de ce document in extenso est tout sauf une perte de temps.

Pour les auteurs il s’agit de proposer « une exploration fine de la non-demande d’accueil et d’accompagnement à la parentalité ». « Comment s’explique le faible recours à l’offre, au-delà d’une insuffisance de places ou d’un déficit potentiel d’information sur les ressources existantes (« freins objectifs ») ? Quels sont les ressorts d’une possible mobilisation de l’offre et les obstacles en cas de non-demande ou de non recours ? Dans quelle mesure des différences de normes et de valeurs éducatives avec les institutions d’accueil et d’intermédiation entrent-elles en jeu dans les déterminants des pratiques et arbitrages réalisés par les familles ? »

Leur hypothèse est que la faible part d’enfants pauvres dans les EAJE et la fréquentation limitée des parents vulnérables dans les actions de soutien à la parentalité relèvent davantage de freins subjectifs, voire d’un choix délibéré des familles.

Nous citons un long passage de ce rapport car il nous semble très éclairant, qu’il fait écho à certains de nos constats et qu’il cite une étude québécoise très riche que nous connaissions déjà. Dans cet extrait, les auteurs évoquent l’hypothèse d’une forme de « retrait éducatif » des parents très défavorisés par rapport aux ressources extérieures.

« Ainsi, différentes études pointent ce constat : les parents les plus démunis font moins (sous un certain angle) avec et pour leurs enfants et, de plus, désirent moins faire de choses (lecture, discussions, sorties). Ainsi, une étude québécoise « Mieux connaître la parentalité au Québec » menée auprès de 15 000 parents d’enfants de moins de 5 ans par questionnaire par l’association Avenir d’Enfants apporte trois enseignements.

Premièrement, les parents « défavorisés » (plus faible niveau de diplôme et de revenus notamment) ont moins de pratiques éducatives, codées comme plutôt positives, avec leurs enfants : ils leur lisent moins fréquemment des histoires par exemple que les parents plus favorisés. Mais ils fréquentent également moins de lieux publics avec leurs enfants (squares, jardins), se rendent moins souvent à des activités liées au développement de l’enfant et sont moins informés de telles activités. Comme le dit l’étude « les parents n’ayant aucun diplôme sont moins susceptibles de connaître les services offerts aux familles ».

Deuxièmement, ces mêmes parents défavorisés ont moins de demandes ou d’envies de telles pratiques éducatives (là encore codées comme « positives » parce qu’en rapport avec le développement de l’enfant). Ainsi, ces parents sont moins fréquemment en demande d’information sur des sujets tels que la santé et le développement socio-affectif de leur enfant.

Troisièmement, les parents défavorisés ressentent moins de pressions et de stress dans leur parentalité que les parents des milieux plus dotés. « Les parents vivant dans un ménage à faible revenu lisent ou racontent moins souvent des histoires, ont un sentiment d’efficacité parentale plus fort, vivent moins de stress parental, sont plus nombreux à ne s’imposer aucune pression concernant la façon dont ils s’occupent de leurs enfants. Plus le niveau de revenu et de scolarité des parents augmente, plus ceux-ci se disent stressés et soumis à des pressions. »

Ces trois constats amènent à ressentir l’attitude de certains parents en situation de pauvreté par rapport aux modes d’accueil et aux ressources extérieures en matière de parentalité non pas uniquement comme de la restriction (j’aimerais mais je ne peux pas) ou de la défiance (ça pourrait m’intéresser mais c’est inconnu, un peu inquiétant ça peut être périlleux…) mais comme une forme « d’indifférence » (ça ne m’intéresse pas pour mon enfant). »

Les auteurs citent une autre étude, belge celle-là (Etude NOUR, Université Catholique de Louvain en partenariat avec l’association RIEPP, Réseau Initiatives Enfants Parents Professionnels) :

« Comme son nom l’indique, le non recours par « non-concernement » renvoie au fait ne pas se sentir concerné par ses droits ou, dans le cas présent, par les services auxquels on pourrait pourtant légitimement prétendre et recourir. Plus précisément, dans notre échantillon, ce type de non-recours concerne des parents qui n’identifient pas les milieux d’accueil de la petite enfance comme leur étant destinés et/ou comme pouvant être potentiellement utiles, que ce soit pour eux ou pour leurs enfants. Ne se sentant pas concernés par l’offre, la plupart d’entre eux n’ont jamais envisagé d’y recourir, ce qui explique qu’ils aient une connaissance très limitée des milieux d’accueil. »

Ces extraits nous semblent cruciaux car ils permettent de souligner les injonctions paradoxales auxquelles peuvent être soumis les acteurs du soutien à la parentalité de la part de certains financeurs, publics comme privés, en tous cas lorsque ces acteurs du soutien cherchent à atteindre spécifiquement des familles en situation de pauvreté. Répondre aux attentes et aux besoins des familles, co-construire les actions avec les bénéficiaires, voire partir de leurs souhaits pour monter ces actions, constituent des critères mis en avant dans certains appels à projet. Or, d’une part les familles vulnérables expriment spontanément moins souvent un besoin d’information ou des attentes sur le strict sujet de la parentalité et les sujets qui les motivent ne correspondent pas forcément aux sujets qui préoccupent les spécialistes du développement de l’enfant et de la prévention précoce. D’autre part il est évident que les parents qui s’interrogent, recherchent des informations, expriment des besoins, sont ceux qui sont déjà conscients des enjeux de la parentalité et du développement du jeune enfant et mettent déjà en place des pratiques propices à ce développement.

Reprenant l’étude québécoise déjà citée, les auteurs du rapport du CREDOC écrivent : « On remarque d’abord que plus le besoin général en information est élevé, plus ils [les parents] sont nombreux, en proportion, à avoir lu ou raconté des histoires à leurs enfants de 0 à 5 ans au moins une fois par jour. Ce même gradient est observé en ce qui concerne le besoin en information sur la santé et les soins des enfants. Pour ce qui est du besoin en information sur des aspects socioaffectifs, cette fois, ce sont les parents ayant un besoin [d’information] considéré comme modéré (43%) ou élevé (43%) qui présentent les plus fortes proportions de ceux ayant fait cette activité parentale positive quotidiennement. »

Ces différents constats illustrent bien l’effet Mathieu ou comment, avec des interventions très universelles, le risque est de ne toucher que les publics déjà informés, déjà outillés, déjà « conscientisés », statistiquement plus nombreux parmi les classes moyennes et aisées, et en général les premiers et les plus nombreux à se saisir des services proposés. Si on ne communique pas spécifiquement en direction des plus vulnérables (pour ne pas les stigmatiser), alors on ne les voit pas dans les dispositifs mis en place.

Or, tout comme le rapport de France Stratégie pointait les bénéfices d’un accueil en crèche pour les enfants en situation de pauvreté, les auteurs du rapport du CREDOC estiment qu’il peut vraiment y avoir du sens à proposer des actions de soutien à la parentalité aux familles défavorisées :

« On peut néanmoins trouver matière à s’intéresser spécifiquement aux situations familiales les plus modestes, voire pauvres, lorsque l’on constate que, dans les ménages à faibles revenus, la faiblesse des pratiques parentales est redoublée par une moindre attention, une moindre curiosité aux différentes ressources possibles autour du jeune enfant. Différentes études pointent ce constat : les parents les plus démunis font moins (sous un certain angle) avec et pour leurs enfants et, de plus, désirent moins faire de choses (lecture, discussions, sorties). (…) On observe donc que la pauvreté va avec le fait de faire moins, pour des raisons de stress, d’empêchement, mais également de moins souhaiter faire de chose avec et pour son jeune enfant. »

Trois autres passages de l’étude du CREDOC nous semblent particulièrement instructifs. Le premier concerne les mesures de protection de l’enfance et la façon dont elles sont perçues par les familles. « Il ne s’agit pas d’en appeler à la levée d’une crainte pour les enfants de ces familles ou à l’abandon de toute évaluation. Mais il s’agit pour les professionnels, de la protection de l’enfance comme de l’accueil de la petite enfance comme du soutien à la parentalité, de pouvoir le faire en donnant à voir clairement aux parents ce qu’ils attendent et espèrent pour les enfants (qu’est-ce qu’un parent suffisamment bon ?) et en leur livrant, le cas échéant, les clés, les attitudes, les méthodes pour accéder à ses bonnes pratiques. (…) Ces femmes ont le sentiment d’être confrontées à un jeu « aveugle » où des professionnels prétendent les évaluer et sanctionner la validité de leur parentalité sans leur laisser voir ni leur transmettre ce que sont leurs attendus concernant la « bonne parentalité ».»

Toujours au sujet des interventions en protection de l’enfance: «Nous insistons sur ce point : il nous a semblé que ces parents ne refusent pas l’intervention de la protection de l’enfance en soi (même si elle est très menaçante), ils en refusent surtout des modalités d’intervention extrêmement asymétriques où ils sont piégés dans un jeu institutionnel à leur détriment. On a presque le sentiment, à les entendre, qu’ils sont perplexes et déçus que les professionnels de la protection de l’enfance interviennent auprès d’eux mais sans leur donner à voir le regard, le concernement, les attentes qu’ils pourraient avoir envers eux et pour leurs enfants. Comme si ces professionnels intervenaient au nom de la protection des enfants mais manifestaient – en même temps – qu’ils n’ont pas vraiment de considération pour leurs enfants. Aussi, il nous semble que ces femmes ne refusent pas d’être accompagnées mais cherchent, au contraire, un « véritable » accompagnement. C’est-à-dire, un accompagnement où la conception de l’enfant mise en jeu, les critères d’évaluation de sa situation soient clairs et partagés. Qu’elles puissent s’en emparer dans leur propre transition de parentalité. »

Nous essayons chez PAPOTO de partager avec les parents des consensus scientifiques sur les besoins fondamentaux du jeune enfant et donc des attendus très concrets en matière de pratiques parentales ajustées à ces besoins. Et comme élément de notre posture, il est  fondamental de rappeler aux familles pourquoi nous sommes là, avec elles, dans le cadre de ces ateliers : parce que le bien-être et la destinée de leurs enfants nous concernent. Nous postulons aussi une réelle transparence. Nous expliquons les missions de PAPOTO, nous justifions auprès des familles le fait d’intervenir dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou dans des hôtels sociaux : « pour un ensemble de raisons, parce que vous venez d’arriver en France, parce que vous avez du mal avec l’écrit, parce que vous êtes pris par d’autres urgences, vous avez peut-être plus de difficultés à accéder aux informations. Or, vous y avez droit. Notre travail est de vous faciliter la tâche, de rendre ces connaissances plus accessibles ». Ce qui ne nous empêche pas par ailleurs de mettre également en avant les forces et ressources de ces parents qui ont eu à surmonter bien plus d’obstacles que nous n’en rencontrerons probablement jamais dans notre vie.

Le deuxième passage qui a également retenu notre attention est celui relatif à l’adhésion des mères à un modèle éducatif « traditionnel » ou « contemporain », selon leur statut marital. « On a justement le sentiment que le positionnement éducatif « contemporain » d’une partie des femmes que nous avons interrogées est lié à la distance ou à l’absence du père dans leur vie avec leurs enfants. Comme s’il était d’autant moins pensable et envisageable pour ces femmes de se situer dans un modèle éducatif « traditionnel » qu’un des rôles de ce modèle n’est pas ou trop mal, trop intermittemment, tenu. Plus précisément, nous avons le sentiment que la mise à distance du modèle « statutaire traditionnel » est en quelque sorte facilité par la mise à distance du père des questions éducatives. »

D’autres travaux l’ont montré : la monoparentalité en tant que telle n’est pas un facteur de risque pour l’enfant. Elle l’est lorsqu’elle est subie ou parce qu’elle est associée à d’autres éléments, une plongée dans la précarité, un contexte de violences conjugales, une dépression maternelle… Parfois le célibat de la mère et l’éloignement du père se révèlent au contraire des facteurs de protection pour la femme comme pour l’enfant. Il nous faut donc éviter d’avoir sur ce sujet des positionnements binaires ou trop définitifs.

Enfin, les auteurs évoquent précisément « les mères de migration récente », qui constituent près de 80% de nos bénéficiaires. Ils disent noter chez ces femmes  « un fort désir de changement dans leur façon d’être parent par rapport à ce qu’elles ont-elles-mêmes connues durant leur enfance. » « Ces femmes, toutes issues d’Afrique Subsaharienne, décrivent une éducation faite de distance, de froideur, de dureté, entrecoupée de ruptures affectives extrêmement brutales. Aussi, elles ont le désir, par elles-mêmes, de changer leur positionnement éducatif. » Nous faisons le même constat.

Parmi les recommandations liées aux actions de soutien à la parentalité, Pierre Moisset et ses co auteurs évoquent la nécessité de partager avec les parents un référentiel clair relatif au développement de l’enfant:

« Pour travailler avec les parents en situation de pauvreté, vulnérables, les professionnels de l’accueil, de la prévention, de la protection doivent savoir ce qu’ils attendent plus spécifiquement en termes de développement et de bien-être de l’enfant, établir un référentiel qu’ils doivent pouvoir partager et débattre avec les parents. Ils doivent dans un contrat de confiance s’exposer aux parents en tant qu’acteurs concernés par et pour leurs enfants s’ils veulent espérer pouvoir travailler avec eux ».

Sur le site Les Pros de la Petite enfance, Pierre Moisset appelle à en finir avec « des normes flottantes insupportables ». Ce que l’on peut interpréter à la fois comme un appel à sortir d’une forme de relativisme (toutes les pratiques se valent, il n’y a pas de bonnes ou mauvaises façons de faire) et un appel à remettre le curseur sur le développement de l’enfant, rejoignant en cela une préconisation du rapport d’Anne Raynaud sur les compétences socle chez les professionnels du soutien à la parentalité qui incitait à remettre l’enfant au cœur des actions de soutien à la parentalité. L’objet de PAPOTO étant de partager avec les parents des consensus scientifiques, et donc des normes et des attendus, scientifiquement fondés, nous adhérons à ces préconisations.

Les auteurs estiment aussi nécessaire de « penser non pas simplement en termes d’information mais de sensibilisation « renforcée » », de chercher à convaincre les parents de l’utilité pour eux et leur enfant des dispositifs proposés. Là encore, c’est une grande partie de notre travail : aller à la rencontre des familles vulnérables partout où elles se trouvent, réfléchir aux leviers motivationnels qui sont les leurs, trouver les éléments de langage qui vont fonctionner, parler de nous, des raisons qui nous poussent à venir les trouver, de notre intérêt pour elles et leurs enfants, leur proposer la mise en commun de notre savoir académique et de leur savoir expérientiel.

Concernant les femmes migrantes, les auteurs constatent qu’elles « ne semblent toutefois pas du tout attirées (ou ne pas rechercher et donc ne pas percevoir) par les ressources d’aide à la parentalité type REEAP ou LAEP ».  « Elles sont à la recherche de ressources leur parlant de leur parcours. C’est-à-dire de témoignages et réflexions de femmes africaines prises dans une même transition de parentalité avec les mêmes coordonnées culturelles que les leurs, ce qui esquisse une piste de réflexion consistant à valoriser et à diffuser des initiatives prises par des parents de différentes aires culturelles ».

Là aussi cette suggestion nous semble très pertinente. Nous y voyons néanmoins une limite, concernant notre approche et nos actions. Les personnes qui animent nos ateliers sont des professionnelles spécialistes de nos sujets et c’est ce qui les rend légitimes auprès des parents qui ont confiance dans leur expertise. Nous considérons qu’il est très important que les informations transmises au cours de ces ateliers soient validées sur un plan scientifique. Etre de la même origine que les parents rencontrés ne peut pour nous constituer un critère de légitimité suffisant.

En revanche, en raison des lieux choisis pour nos interventions (maisons de quartier, centres sociaux, hôtels sociaux, CADA etc), les groupes de parents sont relativement homogènes, sur le plan socio-économique et sur le plan culturel (la plupart sont étrangers ou d’origine étrangère et font référence au « pays », à la culture, au « bled », au « village », à la communauté…). Et ils se retrouvent donc dans les échanges, les témoignages, les histoires de vie. Ce qui questionne d’ailleurs le souhait parfois affiché par des structures partenaires de constituer des groupes socialement « mixtes », comme si la mixité était en soi un avantage, un idéal vers lequel tendre absolument. Or, d’après notre expérience, elle peut en effet se révéler très riche mais également contre-productive : des parents aux parcours trop éloignés, avec des niveaux de vulnérabilité trop différents peuvent se retrouver mal à l’aise d’être réunis dans un même groupe.

Ces deux documents publiés très récemment viennent en tous cas nous conforter dans nos objectifs, notre approche, notre posture. Mais ce sont finalement les retours encourageants des familles elles-mêmes qui constituent la meilleure des validations.

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